« Oh, merde, j'suis désolé... » Coup classique, le café renversé, un regard et hop ? Oui, en effet. Et entre eux deux, ça ne s'est pas vraiment passé comme ça. Jassander avait toujours été une fille qui s'énervait très vite, trop vite, même. Mais à ce moment là, elle était tellement blasée qu'elle n'avait même pas régit, a part un long soupir exaspéré. Cette malencontreuse rencontre avait eu lieu sur le campus, alors qu'il étaient tous les deux en première année. Lui était censé rejoindre ses potes, et elle devait accomplir un de ses bizuts, en vain. Elle n'avait jamais aimé cette idée de devoir prouver sa valeur pour pouvoir être acceptée quelque part. « Je t'en paies un pour me faire pardonner ? » Elle a relevé les yeux vers lui, un peu perdue, et après une hésitation qui avait fait douter le jeune homme de son état mental, s'était enfin décidée. « Tu veux pas plutôt m'aider à accomplir un de mes bizuts ? » Bien qu'un peu suspicieux, il avait fini par accepter, amusé par l'idée, et mettant sa fierté de côté. Durant cette journée, il devint donc "l'esclave" de Jassander. Et pour deux personnes qui ne se connaissaient absolument pas, ils n'ont pas arrêté de se marrer.
Seulement, quand la journée pris fin et que chacun repris son chemin le lendemain, ils ne se parlèrent plus vraiment. Il y avait quelques sourires dans un couloir, un hochement de tête de loin pour se saluer, mais rien de plus. Ce fut lui qui revint vers elle. « Jassander ? J'aurais un truc à te demander... » Surprise, elle se retourna, se demandant s'il s'agissait pour lui aussi d'une aide quelconque pour réaliser un bizut. Sauf que l'année était déjà pas mal avancée, et il avait l'air suffisamment courageux et débrouillard pour être déjà officiellement intégré dans sa fraternité. « J'suis désolé, c'est un peu délicat, mais bon, vu que j'ai du faire semblant d'être ton esclave pendant une journée, j'me demandais si tu pouvais pas faire semblant de ; enfin... » Elle fronça les sourcils, tandis qu'il cherchait ses mots, apparemment incapable de prononcer ce qu'il attendait d'elle. Un sourire fugace se dessina sur ses lèvres lorsqu'il se rendit compte qu'elle devait être dans la même situation que lui lorsqu'elle lui a demandé de l'aider pour son bizut. Elle lui adressa un sourire encourageant, et il se décida. Après tout, elle lui avait demandé quelque chose de plus embarrassant puisqu'ils ne se connaissaient pas encore. Il savait qu'il ne paraîtrait pas totalement bête si elle refuser. « Ben, voilà, j'ai une réunion de famille dans une semaine et je voulais savoir si t'accepterais d'y aller avec moi en te faisant passer pour ma petite amie. »
Et elle accepta.
Pourquoi lui avait-il demandé à elle alors qu'ils se connaissaient à peine, n'ayant vraiment parlé qu'une seule fois ? Et pourquoi avait-elle accepté sans poser de questions ? Ils y avaient pensé, chacun, mais avaient pensé que la réponse de l'autre les mettraient dans l'embarras, et avaient préféré se taire. Et lorsque pour prouver leur bonne fois, ils s'embrassèrent devant les McAnders au grand complet, ils regrettèrent de n'avoir rien demandé. Le baiser n'avait duré que deux secondes au maximum, mais aucun ne s'y était vraiment préparé, et c'était assez troublant, pour deux presque inconnus qui étaient liés l'un à l'autre un peu à la va-vite.

« eeeeeh ! T'es venuu ! » Il fronce les sourcils en la regardant tituber, puis lève les yeux au ciel. Il accepte le verre qu'elle lui tend histoire qu'elle en l'engloutisse pas, étant donné qu'elle l'air déjà bien éméchée. « T'es sur que ça va, Jazzy ? » Puis, il fronce les sourcils. "Jazzy", c'est le surnom qu'il lui a donné quand ils devaient roucouler devant leurs parents. Ouais, lui aussi, il a déjà pas mal bu, tout compte fait. Faut dire qu'il avait déjà bu un peu avant de venir.
Et plus tard, dans la soirée, alors qu'ils sont tous les deux à moitié inconscients, seuls dans une chambre, ce qui devait arriver arriva, et ils couchèrent ensemble. Sauf que le lendemain, le portable de Jass sonna, la jeune fille ayant déjà un truc de prévu, elle n'eut pas le temps de le réveiller pour parler ni quoi que ce soit, et partit sans laisser de mot.
Depuis ce jour, ils n'ont fait que se croiser, gênés, et n'ont pas encore eu l'occasion de parler. Pour Jass, la discussion est inévitable ; elle veut tout mettre à plat pour que ça soit moins confus, mais pour cela, il faudrait déjà qu'ils arrivent à se voir seul à seul.